1994 – 1998 : « EL RINCON DE FRANCIA »
Albeiro avait un souci majeur : Lorsque les petits vieux avaient une famille, un toit où dormir, le don de persuasion et le charisme du jeune garçon faisaient merveille : un peu de compassion, un peu « les gros yeux » auprès des familles, avec une phrase sans cesse répétée : « Je vous aiderai, mais vous n’avez pas le droit d’abandonner votre abuelito »
Mais lorsque le gamin trouvait une petite vieille, sous un escalier ou dormant sur une pierre tombale, dans le cimetière… lorsque l’un de ses protégés, reclus dans son « ranchito », était trop malade, ou paralysé, et que son état empirait, « La Casa de Los Recuerdos », le centre de jour ne lui était d’aucun secours. Certes, la cuisine fournissait le repas, que les petits anges gardiens montaient distribuer à ces malheureux, mais Albeiro avait besoin d’une autre maison, où il pourrait «intégralement » prendre en charge les plus démunis, les plus abandonnés, les plus malades.
La chance, ou « le Destin », ont voulu que Patrick Beuglot, fondateur et président de l’associaiton « Un Coin de Colombie », travaille dans une des 400 Missions Locales qui, aujourd’hui, sur tout le territoire français, aident les jeunes sans formation et sans emploi, à « aller de l’avant », et à s’en sortir.
Grâce à l’opération « Défi », qui fut proposée aux Missions Locales, en 1992, et à la bienveillance de la direction de « la Mission Avenir Jeunes du Pays Basque », à Bayonne, il put proposer « Le Défi Bucaramanga » : Douze jeunes français iraient en Colombie, construire, en compagnie de douze Jeunes colombiens, le « Rincon de Francia », le « Coin de France », centre de vie où Albeiro pourrait héberger, nourrir et soigner, une trentaine de petits vieux totalement abandonnés. Quoi de plus gratifiant, pour des jeunes, que d’apprendre les métiers du Bâtiment, en construisant « réellement », au profit de plus malheureux que soi, et à l’occasion d’un voyage que l’on aura peu de chance de répéter ?
Ce fut une rude bataille pour monter le projet, trouver les financements, vaincre les diverses « frilosités ». Elle dura plus d’un an, mais, en Janvier 94, douze jeunes du Pays Basque s’envolèrent pourla Colombie, et en deux mois, bâtirent la plus grosse partie du « Coin de France ». Pour l’achever totalement, il fallut deux ans, beaucoup de soucis, et l’aide des français.
Le centre « Rincon de Francia » était une construction solide en béton armé, adossée à un contrefort escarpé de la ville, situé dans la zone de Morrorico. Il bénéficiait d’une certaine sécurité du fait de la proximité d’une importante caserne de l’armée colombienne, donc le commandant connaissait et aidait Albeiro.
Le « Coin de France », comportait, sur deux niveaux, une salle commune, des dortoirs, des chambres individuelles et leurs dépendances. Le premier niveau était réservé aux plus démunis. Au premier étage, Albeiro hébergeait des Abuelitos malades, dont les familles pouvaient payer une « petite » pension. Ainsi, Albeiro finançait une grande partie du fonctionnement du centre.
Les quelques trente personnes ainsi prises en charge, coulaient des jours « presque heureux » au rythme des activités et des visites qu’avait négocié Albeiro avec des collèges et les universités de la ville. Au « Coin de France », on chantait, on dansait, et on priait beaucoup dans la petite chapelle, ouverte àtout le quartier.
Tout était presque parfait… mais en 1977, le Destin allait tout changer.